40 ans de leadership communautaire
La célébration du 40e anniversaire du leadership communautaire dans la lutte contre le sida est douce-amère. Malgré le fait qu'une grande importance politique soit accordée au leadership communautaire - notamment avec les objectifs de la déclaration politique de l'Assemblée générale des Nations unies - les ressources allouées aux mesures sont toujours insuffisantes. Dans le même temps, les communautés sont attaquées dans certains pays et l'espace de la société civile est restreint en de nombreux endroits, notamment par le manque de moyens financiers. Cela rend impossible une véritable appropriation et un leadership. Toutefois, nous constatons également une vulnérabilité et une résilience. Dans certains pays, les nouveaux gouvernements conservateurs ferment délibérément tous les espaces où les communautés avaient auparavant leur siège. Dans ce contexte, les preuves de l'efficacité et de la nécessité du leadership des communautés sont de plus en plus nombreuses.
Les présentations de Mandisa Dukashe d'Afrique du Sud, de Veriano de Souza Terta Jr. du Brésil ainsi que de Tetiana Deshko montrent à quel point il est important que les communautés soient fortes et travaillent ensemble pour atteindre l'objectif commun. La solidarité ne doit pas seulement être nationale, mais aussi internationale.
Que ce soit d'une part pour défendre les droits de l'homme, pour maintenir les acquis déjà obtenus afin de permettre l'accès à la prévention et aux services médicaux pour tous, mais aussi pour obtenir l'argent des fonds mondiaux internationaux pour la mise en œuvre de tous les programmes et services.
L'Afrique du Sud a montré l'importance des communautés pour combler les lacunes afin que la prévention et les services médicaux parviennent aux personnes. Il est très important que les groupes clés concernés exigent et défendent ce qui est important et juste pour eux. Les activistes ont mené de grandes batailles dans ce sens. Chaque groupe clé (jeunes, HSH, femmes, travailleurs du sexe, etc.) est également expert dans la manière dont la prévention et les services médicaux doivent être mis en œuvre. L'Afrique du Sud a fait de gros efforts pour que les ART et la PrEP puissent être utilisés à grande échelle, mais cela n'a été possible que parce que les groupes clés concernés se sont engagés et ont montré la voie à suivre (par exemple en fournissant des données, en expliquant comment obtenir les fonds internationaux, en luttant avec le gouvernement, en montrant les problèmes auxquels les gens sont confrontés en fonction de leur situation, etc.)
En Ukraine, depuis le début de la guerre, les fonds publics et les aides pour la prévention, les services médicaux et les soins ont disparu. Les organisations de la société civile et les communautés ont pris le relais en matière de prévention et de soins médicaux pour le VIH et le sida. Ceci grâce à la grande solidarité internationale et au financement international. Malgré la guerre, des projets innovants (p. ex. services en ligne, centre de santé mobile) ont permis de réaliser de grands progrès en matière de prévention et d'accès aux services médicaux pour le VIH et le sida, avec par exemple une augmentation de 130 % du nombre d'utilisateurs de la PrEP depuis le début de la guerre. L'importance de la mise en œuvre rapide de projets innovants pour que les personnes concernées puissent accéder gratuitement et facilement à la prévention et aux services médicaux a été démontrée.
Le représentant du Brésil a formulé des défis tels que, il y a de moins en moins de financement et de dons pour le VIH/sida, car les défis dans le monde entier ont d'autres priorités comme la guerre, le réchauffement climatique, etc.
Mais aussi le souci de savoir comment impliquer les jeunes pour qu'ils prennent le relais afin de maintenir et de développer les acquis pour atteindre les objectifs fixés.
Le symposium a montré que même si les ressources sont réparties différemment dans le monde et que les gouvernements soutiennent différemment la prévention, la recherche et le traitement du VIH/sida, nous avons tous en commun, même après 40 ans, que les communautés sont les expertes. Les communautés et les organisations de la société civile doivent continuer à s'engager en faveur des droits de l'homme, que ce soit pour la reconnaissance et/ou la mise en œuvre, pour combler les lacunes en matière de soins et pour que l'accès à la prévention et aux TAR soit le plus facile possible pour tous. Nous devons tous continuer à lancer des projets innovants et à nous battre pour obtenir des fonds afin que les gens puissent bénéficier de la prévention ou de la TAR gratuitement ou à moindre coût.
L'Aide Suisse contre le Sida et les antennes cantonales fêteront leur 40e anniversaire l'année prochaine. Malgré tout ce qui a déjà été accompli, nous ne manquerons pas de travail - car nous sommes les experts ! Il vaut la peine de se battre pour obtenir des fonds de l'OFSP, des cantons et des grandes villes, afin de pouvoir lancer des projets innovants. Notre longue expertise nous aide à rester innovants afin d'atteindre les personnes en Suisse pour la prévention et le TAR pour le VIH. Notre longue lutte pour obtenir des fonds nous a rendus résistants, continuons à nous battre. D'une part, pour que nous puissions élargir et développer nos programmes, mais aussi pour que ces services deviennent gratuits ou moins chers pour les groupes clés.
Francisca Boenders, Directrice générale, Sexuelle Gesundheit Zürich SeGZ